Le printemps approche, l’élevage des canetons aussi . . .
Le printemps nous apporte tant de promesses, c’est une véritable renaissance, dame nature devient plus forte, les bourgeons laissent la place au feuillage dont la finesse, la tendresse, la délicatesse sont un éternel émerveillement. Les oiseaux ont une activité inhabituelle, leurs chants transforment notre environnement en une salle de concert où merles, pinsons, chardonnerets, mésanges, sont autant d’instruments qui interprètent le printemps.
Nos anatidés ne sont pas pour autant inactifs, depuis que les nichoirs sont installés les canes manifestent une grande curiosité, visitant chaque nid avec une certaine excitation, les mâles participent parfois à cette recherche accompagnant leurs compagnes comme pour les guider dans leur choix, cela dit, je pense « qu’in fine » c’est bien la femelle qui décide. . .
Cette période de l’année est sans aucun doute la plus excitante qui soit pour un éleveur, oubliés les problèmes de l’année précédente, nous avons prévu l’imprévisible, à n’en pas douter celle-ci sera la bonne. Les couples difficiles ont été changés de parc, les problèmes de grillage résolus, nous avons prévu des pièges pour les prédateurs et en particulier pour les pies et les corbeaux qui, l’année précédente, ont fait de véritables festins avec nos œufs de garrots ou de harles en qui nous mettions tous nos espoirs ! Notre passion reste la plus forte, une énergie nouvelle nous transporte, stimulant notre créativité sans cesse sollicitée par l’envie de progresser.
Il me semble donc opportun d’aborder aujourd’hui l’élevage des canetons.
Laisser à la cane le soin d’élever les petits constitue sans aucun doute, la méthode la plus simple et la moins contraignante. Si les enclos et l’environnement vous le permettent, il faut y avoir recours pour certaines espèces, je pense en particulier aux bernaches, oies et autres casarkas. En revanche pour les petites espèces, les plongeurs. . . Il est préférable d’élever artificiellement les canetons si l’on veut une certaine réussite.
Pour se faire vous devez disposer d’un éclosoir, de quelques éleveuses pour mener à bien cette façon de pratiquer.
Avant toute chose, vous devez avoir, une idée assez précise de la date du début d’incubation des œufs par la cane pour pouvoir déterminer la date du prélèvement des œufs. Personnellement, je retire les œufs deux ou trois jours avant l’éclosion. Il est préférable de retirer les œufs plus tôt que prévu que de voir les canetons sous la mère. Dans ce dernier cas, il est plus sage d’isoler la cane et ses petits dans un enclos protégé des prédateurs. J’ai fait, bien évidemment, l’expérience de les mettre en éleveuse, ça marche en général, mais les canetons sont très sauvages et c’est toujours avec une certaine angoisse que l’on approche des éleveuses ; on sème une véritable panique.
Un incubateur peut servir d’éclosoir, il est vivement conseillé de ne l’utiliser que pour cette fonction, la température doit être légèrement inférieure à la température d’incubation 36°5 par exemple. L’humidité doit être poussé au maximum. Les œufs y sont placés après avoir été mirés (éliminer les œufs clairs et les canetons morts dans l’œuf) A partir de cet instant, vous ne devez plus ouvrir votre éclosoir avant l’éclosion des petits. Les canetons naissent en général tous en même temps. Il est inutile de vouloir aider les retardataires, on fait souvent pire que mieux.
Il faut maintenant attendre que vos canetons soient secs, laissez les vingt-quatre heures dans l’éclosoir, il est inutile de donner de la nourriture pendant cette période, les canetons ne mangent pas durant les premières vingt-quatre heures.
Une fois bien secs les canetons sont placés dans une éleveuse. Le fond est constitué d’un grillage plastifié (maille d’un cm) éviter le galvanisé qui pourrait favoriser le développement de problèmes cutanés sous les pattes. La hauteur de la lampe doit être réglée pour que la température soit de l’ordre de 35°. La lampe sera remontée régulièrement chaque jour et le bon test sera réalisé en observant les pensionnaires: S’ils sont tassés sous la lampe c’est que la température est trop basse, vous devez les voir aller et venir dans l’éleveuse, certes ils finiront par dormir sous la lampe mais ne seront pas blottis les uns contre les autres. Il faut donc adapter la hauteur de celle-ci en tenant compte du comportement des canetons. Durant les premiers jours, vous pouvez disposer un morceau de « feutrine » sous la lampe qui permettra de maintenir une certaine chaleur et surtout de contenir la semoulette ou les vers de farine. Dès que les canetons mangent sans problème, on peut les laisser sur le treillis, la nourriture étant disposée dans une petite assiette en plastique. Il est très important de mettre à disposition un goutte-à-goutte d’eau fraîche qui remplit un récipient dans lequel on aura disposé des galets pour éviter que les canetons ne se mouillent.
Il faut pratiquer l’éjointage durant les deux ou trois premiers jours, de cette façon, il n’y a pas de problème de saignement. Personnellement j’utilise une paire de ciseaux désinfectés au préalable, consacrée à cet usage. Il existe une autre méthode : la cautérisation à l’aide d’un petit fer à souder qui donne aussi de très bons résultats. Il faut se méfier des espèces qui grandissent très vite en élevage artificiel en particulier des bernaches à cou roux. À dix jours l’éjointage devient une véritable opération tant le développement de l’aile est déjà bien avancé.
Il est important d’éjointer vos anatidés surtout lorsqu’ils ne font pas partie de la faune Européenne, il faut à tout prix éviter la « pollution génétique ». Il faut rappeler ici que l’Erismature à tête blanche est menacé en partie par le croisement possible avec l’Erismature Roux d’Amérique qui ne devrait pas exister « volant » dans notre environnement.
Durant une vingtaine de jours, les canetons vont rester dans cette éleveuse où une nourriture, sous forme de semoulette canetons démarrage, va leur être dispensé. Pour les canards de surface, cette nourriture est suffisante, vous pouvez y ajouter éventuellement des lentilles d’eau et de la verdure. Par la suite mon programme d’élevage est dicté par les conseils donnés par la marque de l’aliment. Je respecte scrupuleusement le nombre de semaines avant de passer à l’aliment d’entretien. J’ai pu observer que j’avais de cette façon beaucoup moins de problèmes d’ailes qui pendent.
Après une vingtaine de jours, les pensionnaires sont changés d’éleveuse et sont placés dans un parc deuxième âge, l’eau devient progressivement plus abondante, ils peuvent commencer de petites baignades et ont la possibilité de se sécher sous une lampe. Le plumage se fait rapidement, attention au baguage, il ne faut pas se laisser « avoir» car, pour certaines espèces, il faut tester la bague une vingtaine de jours après la naissance. C’ est à ce moment-là qu’ il faut sexer vos oiseaux de façon à mettre la bague d’ un côté pour les mâles et de l’autre pour les femelles. Cela vous facilitera la tâche par la suite lorsqu’il s’agira de choisir des couples. Si vous disposez de plusieurs couples reproducteurs d’une même espèce mettez une bague de couleur en plastique à l’autre patte pour différencier les familles, de façon à pouvoir choisir des couples non consanguins sans avoir à vérifier les numéros de bagues ce qui évite des rattrapages inutiles et surtout évitent de stresser vos oiseaux.
Il faut aussi rappeler que les canetons sont vulnérables et qu’ils doivent être protégés des prédateurs (filet de volière).
Après ces quelques conseils, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une très bonne saison de reproduction.
P MARGUIER
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> Les animaux sont des amis tellement agréables - ils ne posent jamais de questions, ils ne font aucune critique.